La route du sel

[smartad id='3' align='center']

Le promeneur qui arpente la petite route des Salines sur les hauteurs de Vauvert entre Gallician et Beauvoisin ne manque pas de porter un regard interrogatif sur l’imposant chantier de forage qui domine la Costière. Il est loin de se douter que le sel qui sera extrait du sous-sol va servir essentiellement à la fabrication du PVC (Polychlorure de vinyle). Un matériau de plus en plus présent dans notre quotidien. Que ce soit au niveau de l’habitat (canalisations d’eau et de chauffage, revêtements de sol et de murs, volets, fenêtres, clôtures…), de la construction automobile, des équipements médicaux, etc.

 

 

Les Salines de Vauvert en exploitation depuis 1973

Tout a commencé en 1962, lors de l’exploration pétrolière dans le Midi de la France. Le forage du puits de « Pierrefeu » a révélé la présence d’un gisement important de sel gemme à plus de 2 500 m de profondeur. En 1973, la société Rhône-Progil démarre l’exploitation sur le site de « Parrapon » afin d’alimenter en saumure les électrolyses de Lavéra, près de Martigues.
Au gré des restructurations dans les secteurs de la chimie et de la pétrochimie, les Salines de Vauvert passent successivement dans le giron de grands groupes comme Ugine Kuhlman, Ato chimie (Elf et Total), Chloé chimie, Atochem en 1983, Arkema en 2004 avant d’intégrer en 2012 le deuxième producteur européen de PVC, Kem One, dirigé aujourd’hui par son principal actionnaire, l’industriel français, Alain de Krassny.

En 1988, Atochem a ouvert une deuxième zone d’exploitation sur la commune de Beauvoisin, au lieu-dit de la Galine et en 1992 le groupe chimiste devient concessionnaire pour 25 ans de la mine de sel. Cette concession dite de « Parrapon » couvre une superficie de 1 454 hectares répartis sur les deux communes (dont 218 hectares acquis par les Salines et 34 réellement occupés par les installations industrielles). Arrivée à expiration en 2017, elle fait actuellement l’objet d’une demande de prolongation pour une période identique de 25 ans.

Un gisement vieux de 23 millions d’années

Les gisements de sel gemme correspondent aux mers anciennes. Après leur retrait, ces dernières ont laissé de vastes lagunes où le sel subsiste après évaporation et qui seront peu à peu recouvertes par de nouveaux sédiments.
Le gisement actuellement en exploitation à Vauvert appartient au système de fossés d’effondrement de Camargue et date de – 23 millions d’années au moment où le Golfe du Lion s’est ouvert du fait de l’apparition de failles et où la Méditerranée a submergé le bassin de Camargue et au-delà.
Dans ce bassin se sont d’abord déposées des argiles (couche pouvant atteindre 2 200 mètres d’épaisseur), puis s’est produit une évaporation de l’eau de mer qui a conduit à la précipitation de sels sur 900 mètres d’épaisseur. Ensuite, l’ensemble du bassin s’est effondré et environ 1 500 mètres de sédiments ont recouvert la couche de sel.

Le gisement exploité par les Salines de Vauvert n’est pas très étendu. Ses réserves, estimées à plus de 47 millions de tonnes en 2003 permettent cependant d’aller au-delà du prolongement de la concession, sachant que les besoins en sel de la filière sont d’environ un million de tonnes par an.

Un mode d’extraction unique en Europe

Le sel exploitable se situe comme nous l’explique, Marc Valette, le géologue des Salines, à de grandes profondeurs (2 500 mètres et plus). Le filon est à haute teneur en sel gemme, avec une faible teneur en éléments solubles qui pourraient gêner l’électrolyse (magnésium, notamment).

L’extraction nécessite la mise en place de forages profonds, par doublets (puits espacés de 9 mètres), employant des méthodes de type « pétrolier », ce qui fait du site de Parrapon un site unique en Europe.
Lorsque les forages sont arrivés au niveau du filon de sel, de l’eau sous pression (90 bars maximum) est injectée dans l’un des forages pour dissoudre le sel et la saumure ainsi formée est remontée par le second puits.

Les salines sont desservies en eau par le canal d’irrigation du Bas-Rhône, dont la station dédiée exclusivement aux besoins de KEM ONE se situe à proximité du carrefour de Gallician sur la RN 572.

 

90 kilomètres de canalisations relient les Salines de Vauvert à Fos-sur-Mer et Lavéra

La saumure extraite est envoyée dans un premier temps dans des réservoirs afin de vérifier sa concentration – elle doit être saturée en sel à 320 grammes par litre – et d’éliminer les impuretés solides. Rectifiée et traitée, elle est stockée dans le grand réservoir à ciel ouvert, puis, de là, injectée dans un pipeline et acheminée jusqu’aux usines de Fos-sur-Mer et de Lavéra (Bouches-du-Rhône). Depuis 1973, ce pipeline appelé saumoduc, en grande partie enterré, fait l’objet de contrôles quotidiens par une entreprise spécialisée, notamment par cheminement sur tout son tracé.

Il s’agit là d’un mode de transport sûr, réglementé et respectueux de l’environnement. Il représente l’équivalent 16 600 wagons de sel qu’il faudrait acheminer chaque année depuis les salines vers les sites de production de KEM ONE (soit 153 camions par jour).

De l’électrolyse du sel jusqu’à la transformation du PVC

Le chlorure de sodium extrait à Vauvert (1,1 million de tonnes par an), sous forme de saumure, alimente en matière première les ateliers d’électrolyse de Fos et Lavéra. A partir du sel, KEM ONE fabrique différents produits. Du chlore, bien sûr, mais aussi de la soude, de l’hydrogène, de l’acide chlorhydrique et de l’eau de Javel.

Combiné avec de l’éthylène, issu du crackage du pétrole, le chlore est principalement employé dans la production de PVC et des chlorométhanes utilisés pour la fabrication de silicones, de gaz fluorés, etc.…

 

 

Des couches profondes du sous-sol des Costières au tableau de bord de notre voiture, aux fenêtres de notre appartement, à notre mobilier de jardin, aux jouets de nos enfants… quel chemin parcouru !

Au-delà des prouesses techniques et des savoir-faire déployés dans l’exploitation du gisement, les Salines de Vauvert mettent en exergue leurs préoccupations en matière d’environnement et leur apport à l’économie locale.

Les modes d’extraction et de transport du sel ne génèrent pas d’émissions polluantes. L’eau nécessaire à l’exploitation (3 millions de m3 par an, environ) provient du canal du bas-Rhône et fait de KEM ONE un des plus gros – sinon le plus gros – client de BRL. Enfin, avec 50 hectares de vignes plantées en Sirah et Grenache, les Salines sont devenues un acteur majeur de la Cave pilote de Gallician.

Crédits photos © KEM ONE

[smartad id='7' align='center']

A propos de l'auteur :

Guy Roca